La SNCF : Pas Publique ? Avec 17 Milliards de Subventions ! Bonne blague !

La rédaction

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Publié le 27 janvier 202510 min de lecture
La SNCF : Pas Publique ? Avec 17 Milliards de Subventions ! Bonne blague !

La récente annonce du patron de la SNCF concernant l’augmentation des prix des billets de TGV de 1,5 % a ravivé le débat sur le financement de cette entreprise publique. “Le TGV n’est pas un service public”, a-t-il précisé, se défendant ainsi des critiques relatives à la hausse des prix. Mais alors, pourquoi les prix des billets de TGV sont-ils si élevés, et dans quelle mesure l’État continue-t-il de financer cette activité ? Ces augmentations des tarifs sont-elles justifiées, ou dissimulent-elles une réalité plus complexe, celle d’une entreprise qui repose largement sur les financements publics, donc nos impôts ? Faisons le point avec des chiffres précis pour comprendre cette situation.


1. La SNCF : Un groupe complexe financé en grande partie par les contribuables


La SNCF, aujourd’hui restructurée, fonctionne sous la forme d’un groupe d’entreprises comprenant plusieurs entités distinctes, avec des missions et des financements bien différents. Cette structure a pour but de mieux répartir les coûts et les sources de revenus, mais le financement public reste omniprésent, notamment à travers SNCF Réseau, responsable de l’entretien des infrastructures ferroviaires.


SNCF SA


La maison-mère, SNCF SA, dirige l’ensemble du groupe et son activité, mais elle ne s’occupe pas directement du transport des voyageurs ni de l’entretien des voies. Elle coordonne l’ensemble des stratégies commerciales et des investissements à travers les différentes filiales.


SNCF Voyageurs


C’est la branche qui gère le transport de passagers, notamment les TGV, les Intercités et les TER. En 2022, les recettes de SNCF Voyageurs ont représenté environ 10,1 milliards d’euros, avec environ 100 millions de voyageurs transportés sur l’ensemble du réseau. Cela représente une augmentation de 6 % par rapport à 2021, mais reste insuffisant pour couvrir les coûts d’exploitation. En effet, le tarif moyen d’un billet de TGV est supérieur à 80 € pour un trajet moyen, ce qui en fait l’un des modes de transport les plus chers en Europe. Cependant, ces revenus ne suffisent pas à compenser les pertes et les investissements nécessaires dans le réseau.


SNCF Réseau : La branche la plus coûteuse et la plus subventionnée


SNCF Réseau, quant à elle, représente l’aspect le plus lourd financièrement du groupe. En 2022, l’entité a affiché des coûts d’exploitation de plus de 15,3 milliards d’euros, incluant la maintenance, la rénovation et la construction des infrastructures ferroviaires. Cette partie est largement subventionnée par l’État, qui verse chaque année des subventions publiques pour permettre à SNCF Réseau de couvrir ses déficits. En 2022, l’État a ainsi accordé environ 3,3 milliards d’euros pour financer l’entretien du réseau, une somme qui reste insuffisante pour combler les besoins totaux. Sans ces subventions, le prix des billets serait encore plus élevé.


SNCF Logistics et autres entités


Outre le transport de voyageurs, le groupe SNCF touche également des revenus du transport de marchandises via SNCF Logistics, qui représente environ 2,1 milliards d’euros de chiffre d’affaires. Cependant, ces revenus sont largement inférieurs aux coûts associés à la gestion et à l’entretien du réseau de transport passagers, et ne permettent pas de réduire la pression sur les finances publiques.


2. L’énorme coût des infrastructures et la place prépondérante des subventions publiques


La SNCF, à travers son entité SNCF Réseau, gère un réseau de plus de 30 000 km de voies ferrées en France. Entretenir, moderniser et développer ce réseau coûte cher. En 2022, les dépenses liées à la gestion des infrastructures ont représenté près de 60 % des dépenses totales du groupe SNCF, soit environ 9,2 milliards d’euros. L’entretien des infrastructures existantes, la construction de nouvelles lignes à grande vitesse (LGV) et les projets de modernisation des équipements de signalisation représentent une part substantielle de ce coût.


Il faut savoir que l’État français a pris en charge, en grande partie, la construction des lignes à grande vitesse, mais le financement de leur entretien reste à la charge des contribuables, au travers des subventions régulières. Si SNCF Réseau devait couvrir entièrement ses coûts via les recettes générées par l’utilisation des lignes, cela signifierait des hausses de tarifs encore plus importantes, rendant le TGV encore moins accessible. Il est donc clair que l’État, et donc les contribuables, financent une partie essentielle de ce système. Mais est-ce justifié lorsque l’on voit les prix des billets de TGV ?


3. Les prix des billets de TGV : Une augmentation justifiée ou une stratégie de rentabilité ?


Les prix des billets de TGV, qui augmentent régulièrement (parfois au-delà de l’inflation), soulèvent des questions sur la gestion de l’entreprise. Si l’on regarde de plus près les coûts associés à chaque trajet, plusieurs éléments expliquent ces hausses :

Coût de l’exploitation : Le coût de maintenance des trains et des infrastructures est élevé. La modernisation du parc de trains coûte également très cher, avec un renouvellement nécessaire tous les 20 à 30 ans. En 2022, la SNCF a consacré environ 1,5 milliard d’euros pour l’achat de nouveaux trains à grande vitesse, un investissement à long terme qui permet de maintenir la compétitivité du service.

Fluctuation du prix de l’énergie : Le TGV étant largement électrifié, l’augmentation des prix de l’énergie (électricité, notamment) a un impact direct sur les coûts d’exploitation. Le coût de l’électricité pour le rail représente environ 25 % des coûts d’exploitation totaux de SNCF Voyageurs. Avec la hausse des prix de l’énergie, cette part a considérablement augmenté ces dernières années.

Concurrence et rentabilité : Avec l’ouverture du marché à la concurrence sur certaines lignes, la SNCF doit également s’assurer que ses revenus restent suffisants pour couvrir l’ensemble de ses coûts. En 2022, la SNCF a en moyenne investi 2,5 milliards d’euros par an pour moderniser les infrastructures et maintenir la compétitivité du service face à la concurrence. Cependant, ces investissements ne sont pas toujours compensés par les recettes générées.


Le tarif moyen d’un billet de TGV, à 80 €, représente bien plus que ce qu’un simple transport de passagers devrait coûter en théorie. L’envolée des prix des billets de TGV ces dernières années semble donc davantage liée à la nécessité de rentabiliser l’exploitation d’un service qui coûte bien plus cher que ce que ses revenus peuvent couvrir. Mais cela n’inclut-il pas aussi une part de bénéfices non justifiés, financée en grande partie par nos impôts ?


4. Une réalité incontestable : Le rôle majeur des financements publics


La vérité, c’est que, même si l’État se défend d’être trop impliqué dans la gestion quotidienne des prix des billets de TGV, il reste le principal soutien de la SNCF. Le financement de l’infrastructure, la modernisation du réseau, et même les coûts de maintenance, reposent en grande partie sur les finances publiques. Il faut savoir que plus de 50 % des recettes de SNCF Réseau proviennent directement de l’État. En 2022, plus de 3,3 milliards d’euros ont été injectés par l’État pour soutenir l’entretien du réseau, alors que les recettes générées par l’usage des lignes n’ont pas couvert les dépenses totales.


Mais une question légitime se pose alors : est-ce que cette entreprise, malgré les subventions massives de l’État, a déjà généré des bénéfices nets sur le long terme ? En réalité, la SNCF n’a pas réellement dégagé de bénéfices solides depuis plusieurs années. Les profits réalisés par certaines de ses branches, comme SNCF Voyageurs, sont souvent réinvestis pour compenser les déficits d’autres filiales, notamment SNCF Réseau, qui a besoin de financements constants pour maintenir le réseau en état.


En d’autres termes, quand on dit que l’État “renfloue les caisses” de la SNCF, cela signifie en fait qu’il subventionne simplement l’entretien du réseau ferroviaire, sans pour autant permettre à l’entreprise de dégager des bénéfices. L’argent public ne couvre pas les investissements dans la modernisation, mais plutôt la réparation et la maintenance d’un réseau déjà existant, qui, malgré les hausses de tarifs, reste insuffisamment rentable.


5. C’est tout de même culotté de dire que la SNCF n’est pas une entreprise publique !


Avec toutes les subventions massives que reçoit la SNCF, il est difficile de la considérer comme une entreprise privée, en particulier lorsque son modèle économique repose essentiellement sur l’argent public. L’État, à travers diverses subventions, injecte des milliards d’euros chaque année pour maintenir à flot cette entreprise. Dire que la SNCF n’est pas un service public, alors qu’elle est largement financée par les contribuables, semble donc un peu « culotté ». La réalité est que, bien que l’entreprise ait été réorganisée pour fonctionner de manière plus “privée” avec l’ouverture à la concurrence, elle reste dépendante des fonds publics pour ses activités de base.


6. Pourquoi le réseau coûte-t-il si cher à entretenir ?


Le réseau ferroviaire français est un des plus vastes d’Europe, avec plus de 30 000 km de voies ferrées. Entretenir une telle infrastructure est un défi colossal, tant en termes de coûts que de gestion. Les voies, les gares, et les équipements de signalisation nécessitent des investissements réguliers pour éviter les pannes et assurer la sécurité des passagers. Mais ce coût élevé n’est pas unique à la SNCF : dans de nombreux pays européens, les entreprises ferroviaires publiques rencontrent des difficultés similaires.


Un autre problème majeur : la vieillesse du réseau. Les lignes à grande vitesse (TGV) ont été en grande partie financées par l’État, mais leur entretien coûte une fortune. De plus, les anciennes lignes doivent être mises à jour pour répondre aux nouvelles normes de sécurité, d’efficacité énergétique et de confort. Cela explique en partie pourquoi les coûts d’entretien sont si élevés.


De nombreuses autres entreprises ferroviaires publiques en Europe sont également en faillite ou en difficulté, à cause des coûts de maintenance des infrastructures, des subventions insuffisantes de l’État, et de l’incapacité à dégager des bénéfices sur le long terme. Ce phénomène est global, et la SNCF n’échappe pas à la règle.


7. Conclusion : Les contribuables financent une entreprise de plus en plus rentable… mais à quel prix pour l’usager ?


L’augmentation régulière des prix des billets de TGV, couplée au fait que nos impôts financent une partie importante de la SNCF, soulève une question légitime : pourquoi l’entreprise publique n’assume-t-elle pas pleinement son rôle de service public en maintenant des prix accessibles pour tous ? Si l’État continue à subventionner l’infrastructure à hauteur de plusieurs milliards d’euros chaque année, il serait légitime d’attendre des prix de transport plus abordables. Pourtant, avec des prix moyens dépassant 80 € pour un trajet de TGV, le prix payé par les usagers ne reflète pas seulement les coûts d’exploitation, mais aussi une stratégie de rentabilité qui reste insuffisante pour garantir la pérennité du service sans des subventions publiques massives.


Au final, si l’on accepte l’idée que les financements publics restent cruciaux pour la SNCF, il est peut-être temps de revoir la question des prix des billets et de l’accessibilité du service. L’argument selon lequel “le TGV n’est pas un service public” semble tomber à plat lorsque l’on constate que, sans une énorme injection de fonds publics, l’entreprise ne pourrait pas fonctionner. Mais alors, faut-il que l’État continue de financer une entreprise dont la rentabilité repose sur l’augmentation des prix pour les usagers ? C’est là toute la question.

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